LE PLUS. C'est officiel : François Hollande sera le candidat du Parti socialiste à la présidentielle de 2012. Le système de primaire n'a cessé d'être raillé par la droite. Pourtant, la candidature du président du conseil général de la Corrèze ne fait pas rire Nicolas Sarkozy. Loin de là.
Nicolas Sarkozy effrayé par le prétendant Hollande ? Il y a quelques mois encore, la perspective faisait sourire en coin. Pourtant, la semaine dernière déjà, le maire de Tulle, qualifié de "candidat du rien", concentrait toutes les attaques de la droite. Hier soir, la riposte battait son plein, orchestrée par l'Elysée. Oui, Nicolas Sarkozy prend le "cas" Hollande très au sérieux. Et pas seulement parce que sa majorité est finalement confortable, à l'issue de primaires réussies.
François Hollande a plus que de simples éléments de langage (la définition du "rien" en politique ?) à offrir. Son engagement dans la campagne a été mûri pendant plusieurs mois de silence, en retrait de la vie politique, au lendemain du congrès de Reims perdu fin 2008. Martine Aubry, partie tardivement, a semblé manquer d'assurance, voire d'arguments, entre les deux tours, son agressivité sonnant comme un aveu de faiblesse. L'ancien Premier secrétaire, lui, s'était préparé à combattre DSK. Hollande est déterminé.
François Hollande calme : déroutant pour Nicolas Sarkozy
Sans aspérités toutefois : le candidat "normal" est un homme lisse. Il sait se maîtriser, ne répond pas forcément aux coups bas, fait peu d'erreurs. Ségolène Royal avait été plus maladroite en 2006. Ce n'est pas un sanguin, sa réflexion prime sur son instinct. Autrement dit une sorte d'OVNI politique pour Nicolas Sarkozy, adepte du rapport de force.
Insaisissable, Hollande est aussi énervant. Il sourit beaucoup et paraît le plus souvent de bonne humeur. Il n'a pas même l'air de vouloir vous séduire à tout prix. Ou de vous faire rentrer dans le rang pour la prochaine bataille contre l'ennemi juré. Comble du type agaçant, François Hollande a reçu le soutien de Jacques Chirac (avant que sa déclaration ne soit qualifiée de boutade par son entourage), l'homme que Nicolas Sarkozy a rallié, trahi, reconquis, et si longtemps rêvé de remplacer.
Le volontarisme sarkozyste mis à l'épreuve
Challenger inattendu, Hollande neutralise une partie des efforts de Nicolas Sarkozy pour 2012 : s'apaiser, peaufiner une image de père de famille rassurante. S'il parvient à faire de sa bonhomie naturelle un style pour sa présidence, Hollande a des chances de victoire. Le bling-bling a déjà du plomb dans l'aile, à gauche comme à droite.
En période de crise, le volontarisme sarkozyste s'avère souvent payant. Sauf qu'il a déjà été mis à l'épreuve des faits, depuis la crise de 2008. Les Français peuvent se laisser tenter par une autre voie - à condition que celle-ci soit crédible. Face à la rigueur imposée d'en haut annoncée par l'UMP, François Hollande a pour lui une image plus accessible et à l'écoute des Français.
François Hollande a tout à prouver
Mais ces atouts sont encore en devenir. La "présidence normale" est un oxymore osé et peu convaincant : par définition, la présidence de la République est une fonction hors du commun, théoriquement visionnaire, placée au-dessus des partis dans l'intérêt de tous les Français, et depuis, le quinquennat, de retour aux manettes de l'action gouvernementale. Rien de normal à cet enchevêtrement de responsabilités, que Nicolas Sarkozy a sous-estimé lors de son premier quinquennat, devenant chaque jour plus inaudible par effet de saturation.
La campagne ne sera "normale" pas plus. Il faudra montrer une capacité à "encaisser" dans la durée. Et à rassembler, au-delà de son camp. Trouver une alliance avec les Verts, parler à l'électorat populaire tenté par les extrêmes et rallier des voix au centre demande une force de persuasion bien plus importante que celle mise en œuvre pour obtenir le soutien des camarades socialistes...
source le nouvel obs
Bref, François Hollande n'a pas encore gagné grand chose. Il a tout à prouver, et, d'une certaine façon, rien à perdre. Nicolas Sarkozy, oui.